Militante jusqu'au bout des ongles

Publié le par joby

Suzette Bajot une femme vaillante

Un vibrant hommage lui a été rendu, un samedi 16 mai de 2009, au ciné théâtre le Majestic, par son groupe du Parti Communiste local, lors de la commémoration de luttes et revendications des ouvriers de la canne, qui s’était déroulé un 16 mai 1950, et ou le maire de l’époque Paul Lacavé avait dit cette phrase devenue célèbre, « tirez sur moi, ne tirez pas sur mon peuple ».

Suzette Bajot est une vaillante femme comme l’était jadis la commune de Capesterre. Cette petite femme au regard vif et acéré ne passe pas par quatre chemins. Avec son franc parler, ses mots sont secs, tranchant et sans ambigüité. Elle n’aime pas l’hypocrisie la Suzette, et la combat. Ce n’est pas son style. Avec elle, ça c’est ça.

Suzette Bajot est née un 10 décembre 1923 à fromager Capesterre. Son enfance se passe sans histoire dans le quartier de Saint Denis. Comme toute les petites filles de sont âge, elle s’amuse avec ses amis. Elle a déjà cette particularité de ne pas avoir sa langue dans sa poche. Elle aime les gros mots, injurier, avoir le dernier mot et pouvait se battre avec n’importe qui. Quand on la cherchait, on la trouvait.

Toute sa scolarité s’effectue dans les écoles du bourg. A 16 ans, sa mère ne pouvant plus l’aider à poursuivre ses études, elle quitte l’école pour les champs de cannes à l’insu de sa mère.
Suzette se marie deux ans plus tard, le 10 avril 1940, à l’âge de dix huit ans. Elle eut trois enfants dont l’une encore vivante.
La vie de Suzette a véritablement changée, le jour ou une vieille connaissance lui proposa un livre sur le communisme. Elle a lu cet ouvrage à plusieurs reprises qui disait que les pauvres devaient s’organiser pour défendre le pain de leurs enfants. C’est aussi à ce moment qu’elle a pris conscience d’une réalité (les conditions de vie et travail de sa mère), et commencé à s’intéresser aux activités de certains hommes, vieux briscards du communisme capesterrien comme Xantippe Emmanuel, Antoine Nanhou, Santalikan ou Maxime.  Ces réunions se tenaient dans un lieu mythique la cour de « man Nobol ». Elle était la seule femme  à suivre ces réunions et elle y allait tous les mercredis.

Suzette Bajot dispose de sa première carte du parti à 21 ans, et à 22ans, elle est devenue secrétaire de cellule.

Peu à peu, Suzette se forge une réputation et s’aguerrie au fil du temps. Elle rencontre à Basse-Terre Gerty Archimède qui voulait mettre en place, l’Union Des Femmes Guadeloupéennes, autrefois, « l’Union des Femmes Françaises ». Elle est membre fondateur de cette Union Des Femmes Guadeloupéennes.

Suzette est une battante, mais aussi une meneuse d’homme. Avec son charisme, elle est à la tête de tous les mouvements sociaux pour la juste cause des travailleurs. Quand elle disait que personne ne travaille, elle était écoutée, et personne ne bougeait. Elle aimait ça Suzette. Dés qu’il y avait « pwofitasyon » quelque part, elle était la, prêt à intervenir par tous les moyens.

En 1950, le mouvement de grève est très important dans la commune. « Nous avons fait fermer l’usine Marquisat, je ne dirais pas comment, et la encore, c’était moi le meneur, avec des hommes solides ». Elle a mené de nombreuses actions très fortes. Les forces de l’ordre qui avaient pris possession des quartiers de Brest sont venues l’arrêter. Elle s’est enfuie, regagnant son domicile deux mois après, se sachant rechercher. Elle se rappelle également de ce fameux jour (le 16 mai) au quatre chemin de Brest ou les gendarmes étaient venus casser les travailleurs qui revendiquaient leurs droits, et que le maire de Capesterre de l’époque Paul Lacavé a dit « tirez sur moi, ne tirez pas sur mon peuple ». A ce moment la, elle était en tête du mouvement. D’autres souvenirs, Suzette Bajot les racontent comme si c’était hier. A l’autre entrée de Brest, au niveau de la vierge, à coté du foyer socioculturel, les gendarmes passaient à tabac un  certain Nubret. Ne pouvant accepter cela, elle s’est jetée sur eux. Pourtant elle était enceinte de deux mois. Elle se souvient encore que les gendarmes voulaient l’arrêter de s’être enfuie avec une autre militante du nom d’Yvonne Onestas, traversant une rivière, et elle s’est retrouvée chez Gerty Archimède.

Suzette Bajot est fière de toutes ses actions menées, pour la juste cause des travailleurs, et plus encore, dans l’intérêt général de la population et elle l’affirme encore haut et fort aujourd’hui en 2009, « s’il faut marcher avec les travailleurs, tant que j’aurais un brin de force, je le ferais. J’aime la lutte. C’est quelque chose que j’ai en moi. Je n’aime pas l’exploitation des plus faibles par les plus forts. J’ai aussi mené des actions et des combats que je tairais. Il y a des choses qui doivent encore rester secret ». Suzette regrette que de nos jours, aucune action ne puisse marcher puisque pour elle tout le monde parle trop. « Avant même de commencer une action, tout le monde le sait déjà ».

Des femmes de son acabit, il devait certainement y en avoir. Elle pense à Mme Ibéné, Mona Cadoce. Elle regrette que de nos jours, les femmes soient lâches, moins solides solidaires et déterminées.

Malgré toutes ces opérations et actions, Suzette Bajot n’a jamais craint pour sa vie. Pour elle, « la mort ne survient qu’une fois ». A 86 ans, elle redoutait juste une non reconnaissance de toutes ses actions accomplies. Sa fille et ses petits enfants n’auraient pas accepté qu’on en fasse des éloges après. Aujourd’hui, Suzette Bajot Néocel vit paisiblement dans sa coquette maison, et continu à prodiguer des conseils, entouré de toute sa famille.

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